De l’implication, ou non, de la France dans le génocide rwandais en 1994.


Patrick de Saint-Exupéry a accompagné les éléments précurseurs de l’opération Turquoise en juin 1994.

Dix ans plus tard, entendant Dominique de Villepin évoquer « les génocides » rwandais, il lui vint la « nécessité » d’écrire cet ouvrage: « L’inavouable » aux éditions « Les arènes ».

La forme peut un peu surprendre car il interpelle le ministre des affaires étrangères de l’époque, Dominique de Villepin, l’emmenant à ses côtés, dans sa mémoire, durant ces journées de juin 1994 à la découverte de l’horreur.

Bon, au delà de la forme, Patrick de Saint Exupéry a une thèse centrale: le gouvernement et l’armée françaises sont impliqués dans la conception et la préparation du génocide. Et l’opération Turquoise avait comme objectif d’exfiltrer les génocidaires. Pas moins…

Pour tout dire, j’ai du mal à le suivre sur ce terrain là car, à ses imprécisions régulières, sont associées quelques hypothèses hasardeuses parmi lesquelles:

1- le COS (commandement des opérations spéciales) aurait été une armée-bis, discrétionnaire aux ordres de l’Elysée sous François Mitterrand… Ben, tiens… Les spécialistes apprécieront.

2- les militaires français auraient été pervertis dans leurs pratiques par le « mal jaune » consécutif de la guerre d’Indochine. Pas moins… C’est vrai que Laurent Beccaria, son éditeur, a favorisé une rencontre avec le commandant Elie de Saint-Marc (ancien para-légion d’Indochine et d’Algérie), bien connu des lecteurs de ce blog. Mais quand même…

Enfin, de mon avis personnel, en supposant que l’Armée Française soit la « grande coupable manipulatrice » à l’origine du génocide: pourquoi aurait-elle inséré et protégé Patrick de Saint-Exupéry et d’autres journalistes dans une unité du COS pénétrant au Rwanda au début de l’opération Turquoise ? Lui et ses compagnons sont « embedded » avec le COS « génocidaire », un peu gros, non ?… On aurait pu s’attendre à ce qu’il lui soit interdit de se joindre à eux ou qu’il soit lâché dans la nature sans protection voire pire… Et bien, que nenni… Ils l’ont pris avec eux, protégé et se sont exprimés devant lui… Et j’en passe….

Bref, ma conviction est que Patrick de Saint-Exupéry a été réellement choqué par ce qu’il a vu en 1994. Pour le reste, je ne le suis pas.

Son ouvrage trouva des détracteurs de poids en la personne de Bernard Lugan et de Pierre Péan, particulièrement dans « François Mitterrand, l’armée française et le Rwanda » pour l’historien Bernard Lugan (commentaire très prochainement) et dans « Noires fureurs, blancs menteurs » de Pierre Péan. Voir aussi les témoignages des officiers supérieurs suivants stigmatisés par de Saint-Exupéry:

Tout ceci n’enlève rien à l’intérêt de la lecture de cet ouvrage que je conseille cependant.

Partager