Les D.O.P, « détachements opérationnels de protection ». Derrière cet acronyme générique quelque peu abscons se cachent les équipes opérationnelles chargées du recueil du renseignement et donc de la torture institutionnalisée de ce fait dans l’armée française durant la guerre d’Algérie. La guérilla, et la guerre contre-insurrectionnelle qui en découle, visent à un enjeu majeur: le contrôle des populations. Ainsi, la recherche du renseignement, les insurgés qui se cachent au milieu des civils, l’engrenage exactions – représailles donnent au renseignement un rôle central. Ce qui amène, d’un côté comme de l’autre, coercition physique, exactions et emploi de la torture.

En fait, l’armée française avait déjà vécu cette situation dans le contexte particulier de la guerre d’Indochine face à une guérilla marxiste terriblement efficace et qui avait pris le dessus sur l’armée française en dehors même des actions strictement militaires.

J’ai trouvé, par hasard sur Rakuten, ce texte édité aux éditions L’Harmattan en 2002.

Cet ouvrage est particulièrement intéressant car il est tiré de l’expérience d’un jeune officier, Saint-Cyrien, parachutiste durant quatre années et qui va se retrouver dans un D.O.P à Sétif durant une année.

Le texte est tout d’abord la restitution des faits auxquels il a été confronté, l’observation des déviances constatées mais surtout l’impact sur les comportements et les personnalités dont la sienne. Peu à peu, l’officier va se détacher du système, de l’autorité et finalement de sa vocation.

Visiblement l’auteur a été marqué et le reste encore, 40 ans plus tard.

L’auteur ne cherche en aucun cas à justifier les faits de torture. Même si la responsabilité du politique et de la hiérarchie militaire reste engagée, il se concentre sur les individus face à l’indicible. L’auteur ne joue pas sur la condamnation moralisante comme on le voit trop souvent de nos jours, il se concentre avant tout sur la morale individuelle de l’homme face à la souffrance et à la dégradation d’un autre homme dans un contexte aussi difficile et compliqué que celui des guerres asymétriques.

Une partie de l’ouvrage s’égare dans des considérations sur la société actuelle mais, en même temps, cela permet aussi de comprendre la profondeur de l’impact de la torture plus de 40 ans après les faits.

Un témoignage de première main, direct, rare, nécessaire sur la guerre d’Algérie. A lire.

256 pages avec annexes. Aux éditions L’Harmattan en 2002.

Partager