Un texte novateur mais…

Nous avons là un gros travail universitaire qui fera date. L’auteur n’est pas un inconnu, enseignant chercheur, il nous avait gratifié en 2010 d’un ouvrage de référence basé sur sa thèse consacrée à la Waffen-SS.

Dans « Combattre en dictature », le parti pris ici est d’analyser, dans une approche résolument sociologique, les armées allemandes engagées dans la bataille de Normandie en 1944. Pourquoi la bataille de Normandie ? Parce que la documentation provenant des interrogatoires, des entretiens mais aussi des écoutes des prisonniers de guerre allemands est abondante.

Cette approche permet vraiment de pénétrer les valeurs, les motivations, la doctrine, la discipline, bref ce qui fait le liant d’une armée qui ne va se déliter réellement qu’au début de 1945. Autre point d’intérêt majeur de l’ouvrage: étudier la Wehrmacht à tous les niveaux: soldats, sous-officiers, officiers subalternes, officiers supérieurs. C’est passionnant de bout en bout. Sincèrement tout est couvert. C’est bien en cela que l’ouvrage fait date.

Mais il y a quelques « mais ». Tout d’abord, et l ‘auteur ne le cache pas, si la masse est là, les échantillons sont pas toujours représentatifs sur le plan de la méthodologie d’analyse des données. Ensuite, la méthode utilisée rend l’ouvrage parfois répétitif et aride. C’est dommage. Enfin, j’ai trouvé que la bibliographie, tout du moins dans sa partie française, souffrait de l’absence de quelques auteurs clés dans l’historiographie actuelle: Jean Lopez et son équipe de Guerres & Histoire, Benoît Rondeau ou encore Hugues Wenkin. Une renaissances des géguerres universitaires-non universitaires ?

Au final, les apports de l’ouvrage l’emportent largement: on comprend mieux le déclin de l’armée allemand tant sur le plan quantitatif que quantitatif et l’impact de la nature du régime nazi à la fois sur son effondrement technique et sur son jusqu’au-boutisme mortifère.

Un ouvrage indispensable sur la seconde guerre mondiale et sur le nazisme !

Combattre en dictature de Jean-Luc Leleu. Aux éditions Perrin en 2022. 784 pages avec notes abondantes, trente annexes très détaillées, sources et bibliographie et neuf cartes dans le texte.

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