Après Charles-Antoine pour « Le jour des barbares » d’Allessandro Barbero, j’ouvre les colonnes de Bir-Hacheim à l’un de mes plus vieux amis, Philippe Butez, qui m’a fait découvrir les wargames anglo-saxons, il y a plus de trente ans maintenant…

Il nous présente un ouvrage rare sur un sujet tout aussi rare: la Commune de Paris en 1871. Je ne connais pas l’auteur mais la maison d’édition, Fayard, est la garantie d’un ouvrage digne d’intérêt.

Voici donc la recension de Philippe Butez sur cet ouvrage:

Depuis le temps que je voulais lire un truc sérieux sur la Commune…

L’introduction correspondait à ce que je voulais entendre : une narration sans idéologie ni mythologie. Mais ce livre allait-il tenir ses promesses ?

Classiquement, l’auteur (un prof d’histoire) dresse d’abord le décor : un Paris remodelé par Haussmann, mais marqué par la misère et une division géographique et sociale (eh oui, le 16ème, déjà, à l’époque…). Il suit ensuite une trame chronologique avec quelques digressions sociologiques.

Suite à l’effondrement du 2nd Empire, une république patriote s’installe à Paris. Après le siège prussien va s’opérer une scission entre une capitale ouvrière et plutôt républicaine, et une province rurale et plutôt monarchiste, où la Commune ne trouvera que peu d’échos. Le divorce est consacré par la composition de le nouvelle Assemblée nationale, installée à Versailles et qui ne comprend qu’un tiers de républicains. Cette assemblée va prendre des décisions intransigeantes contre Paris et tenter un coup de force en Mars 1871, qui échouera mais qui va marquer un point de non retour.

Quelques jours plus tard, une tentative de sortie des Parisiens va se solder par un échec sanglant. A partir de là, l’efficacité de l’armée versaillaise va contraster singulièrement avec le bordel (y a pas d’autre mot) politique de la Commune et l’ineptie militaire des Fédérés. Une semaine de combats urbains en Mai 1871 suffira à écraser la Commune. Ces combats sont d’ailleurs couverts en moins de 60 pages (sur les 600 au total). Ils seront suivis par une répression féroce.

Ce que j’ai apprécié : l’auteur dissipe en effet quelques mythes sociologiques et militaires. Par exemple, les fédérés que l’imagerie populaire de gauche tend à présenter comme des ouvriers de grandes manufactures sont en fait à 80% des ouvriers de PME ou des artisans. Sont également donnés des chiffres assez précis sur les morts militaires (« a one-sided affair » comme disent les Godons : 900 Versaillais et 3000-3500 Fédérés), les incendies, exécutions et massacres commis des 2 côtés (c’est une guerre civile, donc encore plus atroce), les arrestations, jugements et déportations qui ont suivi et leur impact économique. Sont également présents un index des noms propres, une chronologie et une solide bibliographie (où se côtoient par exemple E.Zola et le colonel Rocolle). Cerise sur le gâteau, un chapitre très intéressant est consacré aux transformations et appropriations idéologiques que droite et gauche ont fait subir a posteriori à la Commune.

Ce que j’ai regretté : Seulement 2 cartes (simples) et pas d’iconographie ! !  Ensuite, alors qu’il y a beaucoup de détails, quelquefois arides, sur les querelles intestines de la Commune et sur le fonctionnement de ses institutions, il y en a très peu sur ce qui se passe dans le camp d’en face. Enfin, il aurait été intéressant d’envisager la Commune sous l’angle d’un affrontement entre une avant-garde idéaliste et séparatiste et un pouvoir unificateur et démocratiquement élu (même si monarchiste).

Au final : une impression très positive pour une première lecture sur le sujet. Quant à l’impartialité promise, elle est là, ou presque : l’auteur ne peut éviter une courte page finale de sympathie envers les idéaux républicains de la Commune, finalement pas si éloignés des nôtres.

Du rab ! Pour ceux qui veulent avoir les images qui vont avec, essayez de mettre la main sur « La guerre de 70 et la Commune en 1000 images » (petites mais d’époque, les images), publié en 1965 par le Cercle Européen de Livre (alias Robert Laffont).

La Commune de Paris, 1871 de William Serman aux Editions Fayard, 1986.


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