Attente et déception.

J’avoue que je l’attendais vraiment ce wargame là. D’abord parce qu’il s’agit d’une variante Antique de la règle Au Fil de l’Epée que nous propose Frédéric Bey depuis de nombreuses années et ensuite parce que la saga d’Alexandre reste l’un de mes sujets historiques préférés.

En se concentrant plus en détail sur le contenu livré, les cartes sont plutôt moyennes, les pions sont de toute beauté, les règles (9 pages plus scénarios) sont claires et en couleur et l’aide de jeu plastifiée bien agréable à utiliser.

J’ai quand même été factuellement surpris par les phalanges macédoniennes en pions simples (doubles pions dans GBoA) mais deux pions par unité tactique ! C’est leur donner une grande souplesse… Ce n’est pas neutre, on le verra par la suite.

Sur les règles, pas de surprises. On retrouve celles d’Au Fil de l’Epée, le système est bien rodé. Et l’alternance des activations par valeur d’activation croissante reste un bon moyen de rendre les tours interactifs entre les deux joueurs.

Mais est-ce bien adapté à la guerre antique ? C’est dans l’application que ça va se révéler. Et c’est là que la conjonction de deux facteurs va me poser un vrai problème.

D’abord le choix d’Alexandre contre les Perses, c’est mettre des unités lourdes mais très manoeuvrantes face à des unités légères, bien équipées d’armes de trait mais peu aptes au choc. La capacité de manoeuvre et d’agressivité des Macédoniens est très bien rendue par les valeurs d’activation attribuées aux leaders des deux camps mais aussi par la règle qui permet aux chefs d’aile de permettre à un ensemble d’unités de jouer deux fois. Qui plus est, Alexandre peut, en sus, intervenir deux fois à des moments stratégiques (une fois sur la Granique et à Issos, deux fois à Gaugamélès). C’est simple mais efficace pour valoriser les talents du Macédonien et de ses généraux mais c’est transformer les phalanges et la cavalerie lourde macédoniennes en panzer-divisions…

Par contre, où le système explose, c’est dans l’incapacité à esquiver des troupes légères perses (cavalerie et infanterie) ! Régulièrement, des phalangistes ou des hoplites sont venus casser des unités de cavalerie perse ou des unités légères (archers et javelotiers). Et franchement, ça pose un vrai problème quand le Macédonien est bien agressif !

Si on ajoute à ça le contexte général des batailles proposées (le Macédonien a systématiquement explosé ses adversaires), je me suis retrouvé à simuler les trois batailles et à arriver au résultat historique en un nombre de tours très limité par rapport à ce qui est proposé.

Démonstration:

  • Le Granique (10 tours): j’arrête en fin de tour 1, la messe est dite car Alexandre a bénéficié du meilleur résultat à l’initiative: il active un chef de son choix, oblige un chef adverse à jouer de suite, désigne un chef qui sera inactif dans la partie et après le cycle naturel reprend: je fais jouer Alexandre avec une ré-activation immédiate. Résultat: le Perse est tout cassé. Partie terminée !
  • Issos (12 tours): là je tiens plus longtemps, trois tours. Le Macédonien qui prend l’initiative, qui attaque franchement, même punition, les phalanges sont accrocheuses à souhait et rien n’arrête la cavalerie macédonienne…
  • Gaugamélès (15 tours): là je pensais que la partie pouvait être plus excitante. Sur les ailes, c’est plus compliqué mais la poussée au centre des phalanges et des hoplites continue à faire le ménage de manière systématique. Les chars et les éléphants perses vont un peu ralentir le processus mais l’initiative doublée d’Alexandre utilisable deux fois va à nouveau faire basculer le résultat trop vite: j’arrête au GT4…

La situation à Gaugamélès au GT4:

Donc, au final, un goût étrange d’inachevé…

Quelques remarques additionnelles:

  • Sur la carte de Gaugamélès, le camp macédonien est imprimé en plein milieu de la carte… Les peltastes qui gardaient les bagages sont positionnés en bord de carte, il me semble y avoir un problème…
  • Les marqueurs « Mélée » sont trop peu nombreux et les recto-verso aléatoires. C’est plutôt énervant d’autant plus qu’on utilise beaucoup de marqueurs
  • La table, intelligente, « Niveaux de fatigue et de désorganisation » aurait mieux été placée au dos de l’aide de jeu (à la place de la version GB) qu’au dos du livret de règle, économie de bout de chandelle… En plus il manque des occurrences… Si, si, cherchez, mon ami Frédéric les a repérées de suite… 😉
  • et… sur Gaugamélès, la carte limitée au double A3 entraîne des effets de bord, comment souvent dans les productions Vae Victis ! Ces effets sont bien pratiques pour le Macédonien qui sans cela aurait pu être débordé plus facilement et donc aurait donc du être moins agressif au centre…

Donc une belle réalisation mais quelques problèmes sérieux qui seraient à réviser et qui, au final, me déçoivent plutôt.

A voir pour le prochain opus de la série ?

Un jeu Vae Victis, proposé par Cérigo Editions.

Partager