Carnage et culture. Quel titre !


Il fallait oser, en 2001, sortir un ouvrage mettant en avant les faits saillants de ce qui semblait à l’auteur caractériser l’art de la guerre des Occidentaux.

Cet ouvrage sortit aux Etats-Unis en 2001 puis dans sa traduction française en 2002. Entretemps, les États-Unis avaient connu le 9-11 et la guerre made in USA avait bouté les talibans hors d’Afghanistan. J’avais lu, en 2002, avec grand intérêt cet ouvrage. Flammarion a décidé, en 2010, de proposer de nouveau ce texte aux lecteurs français dans un format de poche. Huit ans après, j’ai pris la décision de le relire et de le commenter.

Mais qui est Victor Davis Hanson ?

Il s’agit d’un historien américain spécialiste de l’antiquité grecque dont j’avais déjà pu apprécié le talent dans deux ouvrages importants:

Ces deux ouvrages ont rapidement pris une place de choix dans ma bibliothèque à la fois par l’érudition de l’auteur que par ses thèses clairement novatrices quoi que souvent risquées. Hanson secoue les neurones et c’est clair que ça ne plait pas toujours. Si on ajoute à ses approches novatrices, une bibliographie toujours clairement commentée et critique, Hanson constitue, avec Basil Liddell Hart et John Keegan, le troisième auteur anglo-saxon qui m’a le plus marqué dans ma passion de l’Histoire.

Avec Carnage et culture, Hanson nous emmène à travers l’histoire de la guerre de l’Antiquité à nos jours avec un objet central qui est d’expliquer en quoi les Occidentaux ont inventé une manière de faire la guerre terriblement efficace qui l’emporte sur toutes les autres approches. Pour Hanson, la cohésion de l’infanterie lourde et la recherche de la bataille décisive constituent les socles à partir desquels va se construire l’art occidental de la guerre. Hanson va prendre  huit batailles de l’histoire de l’Occident pour étayer son argumentation qui vise à démontrer que les facteurs de supériorité des Occidentaux par rapport aux autres civilisations sont: la liberté politique, le capitalisme, l’individualisme,  l’esprit critique, le rationalisme et le débat ouvert.

Les huit batailles retenues sont:

  • Salamine en 480 avant JC contre les Perses,
  • Gaugamèles en 331 avant JC contre les Perses à nouveau,
  • Cannes en 216 avant JC contre les Carthaginois,
  • Poitiers en 732 après JC contres les Sarrasins,
  • Tenochtitlan en 1520-1521 contre les Aztèques,
  • Lépante en 1571 contre les Turcs,
  • Rorke’s Drift en 1879 contre les Zoulous,
  • Midway en 1942 contre les Japonais
  • et Le Têt en 1968 contre les Vietnamiens.

Ce qui m’impressionne le plus chez Hanson c’est clairement sa puissance d’évocation. Sa restitution de ces combats, à travers les siècles, est hallucinante, bien dans la veine d’Anatomie de la Bataille de John Keegan. L’exposé de la thèse d’Hanson sur la supériorité occidentale est par contre plus brouillon et parfois répétitif comme si il avait assemblé des articles pour en faire un ouvrage. Malgré tout, ce texte fourmille de points de départ de recherche bien intéressants pour valider ou invalider sa thèse. Un historien talentueux comme John Lynn s’y est attelé dans son De la guerre: une histoire du combat des origines à nos jours. Stéphane Audouin-Rouzeau s’y est essayé avec moins de bonheur dans son Combattre.

Pour ma part, j’ai encore une fois lu ce texte avec passion et je vous le recommande.

Certains vous déconseilleront cette lecture arguant qu’Hanson est un néo-conservateur américain. Et alors ?  Il fait partie, pour moi, de ceux capables de me faire voir l’Histoire sous d’autres angles et ça, ça fait toujours du bien !

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