Au printemps 2014, le génocide rwandais aura 20 ans. La tragédie qui vit disparaître près d’un million d’hommes, de femmes et d’enfants dans la région des Grand Lacs reste une blessure ouverte dans l’histoire de l’Humanité toute entière. D’autant plus que les causes et les responsabilités de cette série de massacres restent toujours à déterminer de manière sûre malgré l’existance du TPIR (Tribunal pénal international pour le Rwanda).

Bernard Lugan, universitaire, est un historien de l’Afrique dont il a fait le sujet principal de ses nombreux travaux que je relaie régulièrement sur Bir-Hacheim. Il a, qui plus est, enseigné une dizaine d’année à l’Université du Rwanda dans les années 70-80. A noter également qu’il fut expert assermenté auprès du TPIR, cité par la défense lors de plusieurs procès majeurs du TPIR.

Bernard Lugan n’en ait pas à son premier essai sur le génocide rwandais. Il évoque régulièrement le sujet dans sa newsletter mensuelle « L’Afrique réelle » (disponible sur abonnement) et a déjà rédigé plusieurs ouvrages sur le sujet:

A vingt ans des événements et six ans depuis son dernier ouvrage, Bernard Lugan propose de faire le point sur les dix questions qui lui paraissent essentielles autour des événements du printemps 1994:

  • comment l’histoire offcielle du génocide fut-elle écrite ?
  • le génocide du Rwanda était-il programmé ?
  • qui assassina le président Habyarimana le 6 avril 1994 ?
  • le génocide fut-il une conséquence de la démocratisation et des accords d’Arusha ?
  • qui étaient les « hutus modérés » ?
  • pourquoi le président Habyarimana fut-il diabolisé ?
  • les militaires hutu ont-ils fait un coup d’état dans la nuit du 6 au 7 avril 1994 ?
  • Le général Roméo Dallaire fut-il dépassé par les événements ou avait-il décidé de faire gagner Paul Kagamé ?
  • La France a-t-elle une responsabilité dans le génocide ?
  • Le TPIR a-t-il rendu une justice au profit des vainqueurs ?

Comme on peut le constater, les questions soulevées par Bernard Lugan sont précises et réservées à un public plutôt bien au fait des événements rwandais de l’époque. C’est la principale critique que l’on peut faire à l’ouvrage: il eut été nécessaire de bien rappeler les faits, au delà de la chronologie succinte fournie en annexe. Pour le reste, l’ouvrage est une argumentation solidement charpentée, précisément documentée des analyses de Bernard Lugan qui, au delà de l’historien, se révèle doué dans la présentation juridique des faits.

J’avais également la crainte que l’ouvrage soit redondant avec les ouvrages précédents de l’auteur. En fait, il vient s’appuyer sur les derniers faits/analyses/procédures judiciaires connus depuis ses différentes publications.

Bref, pour résumer les analyses de Bernard Lugan, la responsabilité du FPR de Paul Kagamé (au pouvoir actuellement au Rwanda) est clairement engagée dans l’assassinat du président Habyarimana mais aussi dans le déclenchement du génocide, l’ONU a failli dans sa mission, l’armée française n’est pas impliquée dans le génocide et le TPIR est un paravent de justice. On est bien loin de l’image communément admise autour du génocide rwandais.

On peut être d’un point de vue opposé au travail réalisé par Bernard Lugan mais je reste curieux de la réfutation de l’ensemble de ses arguments autrement que par l’anathème, le procès en négationnisme ou les récits de journalistes…

En conséquence, je recommande cet ouvrage tant sur le fond que par l’approche didactique et bien argumentée de l’auteur.

L’ouvrage est édité par les éditions du Rocher dans la collection “Lignes de feu” en janvier 2014 avec 12 cartes couleurs, annexes, chronologie, index et bibliographie.


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