Procès à charge mais dans la bonne humeur !

Un livre un peu étrange dont l’auteur n’est pas un historien et que j’avais laissé passer à sa sortie en 2004. Mais il continuait à me faire de l’oeil dans l’une de mes listes de suivi et la lecture récente de l’excellent travail d’André Bourachot: « Joffre, de la préparation de la guerre à la disgrâce« , m’a finalement fait franchir le pas de l’achat et de la lecture !

Bien m’en a pris. Bon c’est sûr, au début, on se méfie: on est clairement à un procès, on sent très vite que rien ne sera épargné à l’inculpé !

Et puis, petit à petit, l’argumentaire de l’auteur se déroule, précis, appuyé par les témoignages des contemporains, l’analyse des historiens. Les témoins de la défense en prennent pour leur grade (militaires comme Gamelin, écrivains comme Arthur Conte ou historiens comme Gabriel Hanotaux). Bref la mitraille tombe drue avec un vocabulaire succulent dans lequel j’ai ressenti beaucoup de cet esprit wallon que je fréquente régulièrement (l’auteur est né de Liège).

Si la forme du texte (procès, parti-pris et vocabulaire) peut repousser plus d’un lecteur, ce dernier aurait bien tort car le texte de Roger Fraenkel est de qualité tant sur la période précédent la guerre que sur les premières semaines catastrophiques de l’Armée française.

J’ai particulièrement apprécié:

  • le concept d’offensive à outrance et l’impact sur les dispositifs tactiques
  • les opérations en Belgique
  • les offensives françaises catastrophiques
  • le parti-pris de ne pas traiter la bataille de la Marne
  • les saillies sur les traits physiques et de caractère des principaux personnages

Il a manqué selon moi:

  • le choix délibéré de la « tête de turc » limite, de fait, les autres responsabilités de l’appareil militaire et politique
  • il eut été intéressant d’aller plus loin dans la critique des hagiographes de Joffre: leurs motivations, leurs erreurs. Le sujet est traité de ci de là mais un bon chapitre sur le sujet eut été intéressant.

Bref, vous l’aurez compris, j’ai apprécié cet ouvrage iconoclaste et plein d’humour, bel exercice de « remue méninges » tout comme d’ailleurs « Les mensonges de Waterloo » de Bernard Coppens. Finalement, la belgitude me gagne… comme Bernard Arnault ! 😉

Pour compléter cet ouvrage, je ne peux que vous recommander le « Joffre, de la préparation de la guerre à la disgrâce » d’André Bourachot sans doute moins tranché mais bien argumenté sur les responsabilités de Joffre.

272 pages avec un cahier photos (iconoclaste) en n/b. Aux éditions Italiques en 2004.

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