Une histoire militante ?

histoire-de-la-france-militaire-et-resistante-lormierQuoique lecteur régulier, j’ai toujours quelques réticences avec les ouvrages de Dominique Lormier: une approche assez classique des récits de guerre, des sources rarement citées.

Celui-ci n’échappe pas à la règle, voire même va au delà.

Cet ouvrage vise à nous faire connaître l’histoire de la France militaire et résistante de 1939 à 1942. Un deuxième tome consacré à la période 1943-1945 n’a jamais été publié. Si le sujet a déjà été largement couvert par force historiens, l’approche de la France toujours au combat, même dans la défaite, éveillait ma curiosité. Certes la quatrième de couverture m’exaspérait déjà un peu avec ses: « témoignages et archives inédits », « balaie les idées reçues », « enquête rigoureuse », « pour la première fois, l’auteur révèle »…

Le propos de l’auteur est de, je cite,: »balayer les idées reçues sur la participation française à la seconde guerre mondiale ». Beau programme.

A la lecture de la table des matières, on est effaré par le propos.

Quelques exemples:

  • sept semaines de combats méconnus (10 mai au 25 juin 1940): il est déjà fait abstraction de la drôle de guerre durant laquelle on n’a guère préparé un conflit moderne, passons. Combats méconnus ? La campagne de France a largement été couverte par nombre d’historiens de qualité.
  • la victoire oubliée de Narvik: victoire ? les alliés ont été pris de cours et ont été obligés de rembarquer. Si victoire il y a eut, elle fut tactique (saluons la 13ème DBLE…), au niveau stratégique, l’Allemagne remporte la campagne de Norvège…
  • la victoire française d’Hannut-Gembloux: nouvelle victoire tactique, éphémère sur le chemin du contournement de la ligne Maginot par les Panzer divisions allemandes…
  • résistance désespérée sur la Meuse: oui, désespérée… Pour ma part, si je salue les exploits (Camerone, Dien Bien Phu); en termes militaires, il vaut mieux des victoires à des glorieuses défaites désespérées…
  • la victoire inachevée d’Abbeville: mais on est sur la Somme ! Le front est largement débordé, les armées françaises éclatées !!!
  • Lille et Dunkerque: l’armée française sauve le corps expéditionnaire anglais de la capture: ça c’est vrai et cela permit à la Grande Bretagne de continuer dans la guerre
  • résistance désespérée des cadets de Saumur: encore une fois désespérée, elle eut pour effet de retenir quelques jours les allemands devant quelques ponts de la Loire. Mais nous sommes sur la Loire !
  • la victoire de l’armée des Alpes: victoire ? Nous avons arrêté les troupes italiennes en montagne… une victoire ? alors que nos fronts étaient enfoncés par ailleurs ?
  • le ciel n’était pas vide: c’est exact, la Luftwaffe perdit beaucoup d’avions mais la flotte aérienne française fut détruite et les attaques au sol allemandes répétées…

Je ne m’attaquerai pas aux chapitres consacrés à l’épopée de la France Libre mais quand même.

Faire de Bir Hacheim une « bataille décisive », il faut resituer la défense de ce point d’appui (auquel je suis bien attaché…) dans son contexte: une manœuvre offensive de l’armée allemande dans le cadre d’une grande bataille, nous avons réussi à retenir, à nouveau, les allemands au delà des espérances du commandement britanniques mais au final nous avons abandonné la position. Cette résistance a eu un grand impact sur la bataille mais il s’agissait, somme toute, d’un combat partiel. Il eut un impact décisif sur l’image de la France Libre auprès des alliés et des français de métropole: la France était revenu au combat.

Bref, vous comprenez que je suis un peu chauffé par les propos de l’auteur. A trop vouloir placer sa thèse, on la dessert.

En fait, si occasionnellement, nos soldats se sont comportés vaillamment, il n’en reste pas moins que la défaite de 1940 est l’un des désastres militaires les plus grands de l’histoire militaire de la France.

Ce n’est pas desservir l’honneur de nos armes que de le signaler. Quand à la France Libre, elle permit à la Résistance de se structurer et à l’armée française de se reconstruire et de bien belle façon grâce à des officiers comme, De Lattre, Juin ou Leclerc sans oublier l’appui essentiel de nos alliés anglais et américains.

Sincèrement décevant.

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