Guerres & Histoire #17

Le magazine s’ouvre sur un édito de Jean Lopez à deux éléments:

  • tout d’abord, il nous évoque l’« american way of war«   en couverture en sous-titre de la couverture dans lequel se mêlent: religion, pensée libérale, cause juste, capitulation sans conditions de l’ennemi pour apporter une solution définitive au conflit
  • ensuite, il évoque la réduction du nombre de pages du magazine de 116 à 108 pour faire face à la hausse des coûts sans augmentation du prix du magazine. Les temps sont durs.

Le sommaire:

  • L’exclusivité du mois est consacrée au pilote allemand de la 2ème guerre mondiale Jorg Czypionka. Une interview réalisée aux Etats-Unis par Maurin Picard qui vient de rejoindre le comité éditorial du magazine. La chasse de nuit des Mosquito britanniques aux commandes de Me262. Pas grandiloquent du tout avec un pilote n’aimant pas tant que ça tirer… Intéressant ! 😉
  • Caméra au poing: la rubrique est consacrée à « Hollywood s’en va-t-en guerre ». Laurent Henninger nous relate l’engagement de l’industrie cinématographique américain dans l’effort de guerre. Bien illustré comme toujours.
  • A la loupe. Hastings 1066, acte de naissance de l’Angleterre. Une bataille apparemment si connue où Joanne Taaffe nous fait découvrir les incertudes existant toujours autour du lieu de la bataille, des effectifs et de la stratégie voulue ou non de Guillaume de Normandie. L’article se termine sur l’importance historique de la bataille quant à la construction de l’Angleterre.
  • Un objet, une histoire. Lance-flammes: la guerre du feu version XXe siècle. Pierre Grumberg revient sur la conception et l’utilisation de cette arme moderne titant ses origines de l’Antiquité.
  • Les Thermopyles, une victoire volée aux Perses. Dans la rubrique « Chasse aux mythes », Eric Tréguier tord le cou à l’historiographie traditionnelle de la célèbre bataille !
  • Forces spéciales. Le père de la pilule était un SAS. Derrière ce titre volontiers racoleur, Jean-Dominique Merchet nous relate l’engagement de Lucien Neuwirth dans le SAS français de la seconde guerre mondiale.
  • Armée du Kwantung: le laboratoire du fascisme japonais. Nouveau chroniqueur du magazine, Bruno Birolli nous propose un sujet peu connu: le rôle de l’armée japonaise en Mandchourie entre les deux guerres mondiales. L’auteur y voit les dérives du système qui allait pousser au paroxysme et à la guerre le gouvernement japonais de la seconde guerre mondiale. Très intéressant. Cela va vraisemblablement m’inciter à me procurer la biographie que l’auteur a consacrée à un acteur clé de la période: Ishiwara.
  • Peindre la guerre: à quoi rêvent les soldats français. A travers le tableau d’Edouard Detaille, Jean Lopez revient sur le contexte de la peinture militaire française de la fin du XIXe siècle.
  • Fokker E.I, le chasseur qui les invente tous. Le monoplan, la mitrailleuse synchronisée, la chasse au début de la 1ère guerre mondiale. Un article intéressant de Jean-Christophe Noël. On y notera la roublardise du néerlandais Fokker. 😉
  • « Il n’y a d’art opératif que si le politique montre la direction ». Un article dans la rubrique « Doctrine ». Jean Lopez recueille les propos de Benoist Bihan sur ce qui constitue un débat actuel récurrent de la réflexion stratégique, à minima française: le niveau opératif de la guerre. Benoist Bihan en fait le sujet de sa thèse de doctorat en histoire, ça tombe plutôt bien ! Bon en fait, à défaut d’être lumineux, l’article fait avancer le débat. Le fait marquant, selon moi, reste quand même que le grand changement repose sur la dichotomie entre pouvoir politique et militaire: Napoléon n’avait clairement pas ce problème, les démocraties l’ont. La capacité essentielle serait donc d’adapter les objectifs et les moyens militaires aux objectifs politiques. Mais j’ai bien envie d’objecter qu’il faut aussi que les objectifs politiques soient adaptés aux possibilités militaires ! 😀 Je pense que les années à venir seront bien passionnantes sur le sujet !
  • Rubrique « A lire, à voir, à jouer »: toujours aussi intéressante en ce qui concerne les livres. Avec un focus sur la biographie de Françoise Thom consacrée à Beria. Une mise en valeur du remarquable « Sous le feu » du colonel Michel Goya. Et avec les saillies de Jean-CLaude Delhez, redoutable critique particulièrement en ce qui concerne la 1ère guerre mondiale, évidemment ! Quant à la rubrique « A jouer » de Frank Stora, je passe…
  • Le quizz est consacré à la guerre de Trente Ans. J’ai très mal démarré et mieux terminé (14/20). Pas vraiment ma tasse de thé !
  • Dynamite et vieilles dentelles. La chronique jubilatoire de Charles Turquin est consacrée au canon pneumatique Zalinski et à Jules Verne. Mais où va-t-il chercher tout ça ! 😀

Venons-en maintenant au dossier central: la guerre de Sécession, la naissance de l’American way of war !

 

  • Le sujet est bien choisi car le conflit reste peu connu des lecteurs francophones qui bien souvent reprochent aux Américains leur faible conanissance historique et géographique de l’Europe. Pour ma part, je pense qu’il en est de même, en Europe, concernant la guerre d’Indépendance ou la guerre de Sécession justement. 😉
  • Bleus contre Gris, les raisons du bain de sang. 6 questions clés pour caractériser le conflit traitées par Antoine Reverchon: la question de l’esclavage prétexte à la guerre ? pourquoi la guerre éclate-t-elle en 1861 ? le Sud pouvait-il gagner au début ? pourquoi la guerre dure-t-elle si longtemps ? comment le Nord finit-t-il par l’emporter ? quelles sont les conséquences pour les Etats-Unis ?
  • Une guerre napoléonienne rejouée par des amateurs. On voit souvent dans la guerre de Sécession le premier des conflits « modernes ». En fait le propos de Patrick Bouhet est plutôt d’y voir la fin des conflits à la recherche de la bataille décisive. L’amateurisme inhérent à la jeune nation et à ses principes moraux et politiques viendra également affecter la stratégie et les opérations.
  • Gettysburg: une colline, trois jours, 8.000 morts. Point d’orgue de la guerre, cette bataille vient illustrer les propos de Patrick Bouhet dans l’article précédent.
  • Le Nord improvise mieux la guerre moderne. Article de fond de Benoist Bihan toujours à la recherche de la genèse de l’art opératif 😉 Il voit dand le conflit nord-américain des points clés du passage à la guerre moderne: conflit terrestre dont la clé est le blocus maritime et fluvial, la logistique sur un continent transformée par les nouvelles technologies, l’industrie au service de la guerre et la mobilisation décisive des hommes et des institutions. C’est le moins de dire que les cartes n’étaient distribuées également entre le Nord et le Sud…
  • Une postérité politique plus que militaire: Benoist Bihan fait ici le point, de belle manière, des conséquences du conflit sur l’armée américaine, sur la perception du conflit et ses leçons pour les Européens ainsi que sur la naissance de l’ « american way of war » évoquée par Jean Lopez dans son édito.
  • Au final, un dossier peu tactique sur le conflit mais plus centré sur la guerre dans sa dimension stratégique. Travail plutôt convaincant pour ma part.

On appréciera encore et toujours le volume et la qualité des illustrations qui font de Guerres & Histoire, en dehors des textes et des auteurs, l’un des magazines les plus attractifs de l’édition de revues d’histoire militaire.
Les rubriques « L’oeil du cinéma » et « La bataille oubliée » semblent être les perdantes de la réduction de la pagination.
Guerres & Histoire n°17. Numéro de février 2014. Un magazine des éditions Mondadori que vous pouvez retrouver sur Facebook.

Partager