Mais quelle mouche a piqué Jean-Claude Delhez ? 😉

J’avais déjà observé une certaine agressivité de l’auteur au travers de quelques uns de ses ouvrages mais également à la lecture de ses recensions d’ouvrages dans le magazine « Guerres & Histoire ». On a bien ici une charge en règle sur le char d’assaut et les historiens qui l’ont (trop ?) mis en valeur.

Cela m’amène d’abord à faire une remarque sur la tendance actuelle des auteurs d’articles dans les revues ou d’ouvrages sur l’histoire militaire à démythifier ce que certains considèrent justement comme des mythes sur lesquels l’Histoire se serait construite. En fait, cette tendance est née de la ligne éditoriale du magazine Guerres & Histoire et de son rédacteur en chef, Jean Lopez. Le succès rencontré (plus de 50.000 exemplaires vendus par numéro) a sans doute amené bien des auteurs à vouloir systématiser un peu trop cette approche. Intéressant mais à la longue, ça lasse un peu ! Si l’académique parfois ronronne, il ne faudrait quand même pas verser dans un style « Fox News » historique. 😉

Revenons à l’ouvrage sur le fond et sur la forme.

Sur le fond, le travail de Jean-Claude Delhez est intéressant, vivifiant. On peut toujours discuter de son choix porté sur la percée des Ardennes de 1940 et sur la bataille de 1944 toujours dans la même région. Le terrain et les circonstances ne se prêtent guère aux performances blindées: la traversée de la Meuse en 1940 et une offensive en plein hiver ardennais en 1944 ! En plus, j’ai l’impression que l’auteur enfonce une porte plutôt déjà bien ouverte, tout du moins pour les passionnés de la « res militaris », qui savent bien que la guerre moderne, initiée dans la blitzkrieg, est avant tout une question de combat combiné plus que blindé… L’auteur ne le cache pas quand il déploie son argumentation mais il reste sur sa ligne à vouloir démontrer l’inefficacité du blindé. Après ces deux démonstrations, l’auteur balaie l’histoire militaire de la première guerre mondiale à aujourd’hui dans des chapitres bien trop courts à mon goût.

Sur la forme, franchement, il y a des progrès à faire. Les deux longues énumérations de combats tactiques qui structurent l’ouvrage sont fatigants, répétitifs, pénibles à lire. L’auteur, tout à sa démonstration, oublie l’importance de la rédaction de son récit. Il ne suffit pas d’avoir une thèse; encore faut-il la mettre en valeur par un texte construit, dynamique et fluide. Ce n’est pas le cas ici. De temps en temps, il m’a fait penser à l’ouvrage de l’auteur belge Bernard Coppens: « Les mensonges de Waterloo« . Mettre trop d’agressivité dans la présentation de sa thèse et attaquer systématiquement d’autres auteurs nuit clairement pour moi au but recherché. Quel intérêt d’ailleurs de « descendre » le général George Patton en évoquant à peine les difficultés logistiques en ce qui concerne l’arrêt de son offensive en Lorraine ? Encore une autre critique/surprise: l’ouvrage ne comporte pas de bibliographie; par contre, des ouvrages ou des articles apparaissent dans le texte ou en notes de bas de page. J’ai été surpris de n’y voir aucun référence d’ouvrages hors édition française.

Bref, au final, cet ouvrage m’a intéressé, il est argumenté, construit avec sérieux mais l’agressivité sous-jacente et le style d’écriture l’ont rendu pénible en lecture et c’est bien dommage !

Aux éditions Jourdan en 368 pages. En octobre 2017.

 


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